Students on the Beamlines
LE PROJET
Students on the Beamlines est un projet offert par le Canadian Light Source (CLS) ou le Centre canadien de rayonnement syncrotron. Le projet consiste à l'utilisation d'un synchrotron pour tester des échantillons dans le but de faire une découverte scientifique qui aiderait la communauté scientifique. L'aspect le plus important dans l'expérience est que ce sont les élèves qui choississent tout: nous avons choisi notre sujet, notre question, nos échantillons, notre plan, etc. J'ai décidé de participer à ce projet en quatrième secondaire avec cinq autres filles de mon école et nous avons travaillé extrêmement fort pour pouvoir participer à cette expérience. D'abord, il a fallu qu'on décide de notre sujet. On a pris environ deux mois pour décider de se concentrer sur le sujet des abeilles. Ensuite, nous avons fait des recherches pendant environ un an sur les abeilles, les pesticides et leurs causes de mort de ces méllifères. Pendant la majorité de cette année, nous étions focusées sur les pesticides, mais deux semaines avant la remise de la proposition, nous avons décidé de faire notre expérience sur les causes de mort des abeilles, comme des spores.
LE SYNCHROTRON
Un synchrotron est une machine qui produit de la lumière en utilisant des ondes radio et des aimants pour accélerer des électrons à presque la vitesse de la lumière. Les électrons ont tellement d'énergie qu'ils émettent de la lumière. Cependant, les électrons n'émettent pas que de la lumière visible: ils émettent des rayons infrarouges, ultraviolets et des rayons x, par exemple. Les électrons continuent à voyager dans le cercle, mais il y en a qui s'échappent et qui vont sur des tangentes: les beamlines. C'est là où les chercheurs testent des échantillons et créent des images avec les rayons. Le synchrotron peut être utilisé pour tout, que ce soit la biologie, la chimie, la technologie, etc.
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BMIT
Pour ce projet, nous avons utilisé le BMIT ou le BioMedical Imaging Therapy, un beamline qui est utilisé pour des animaux. Ce beamline utilise des rayons x, mais qui ne sont pas les mêmes que l'on utilise chez le médecin. Si on avait utilisé ce dernier, on n'aurait vu que l'exosquellette de l'abeille, qui est très dense. La différence entre ces rayons x et ceux utilisé pour les os est la distance entre l'échantillon et le détecteur. Chez le médecin, le détecteur de lumière est situé très près de l'échantillon, votre main, par exemple. Mais dans le BMIT, le détecteur est placé à environ un mètre de l'échantillon. Ceci fait que les angles créés par les indices de réfraction des structures dans l'échantillon sont exaggérés. Alors, on peut obtenir une image des structures internes de l'échantillon, ce qui est parfait pour notre expérience.
Détecteur
Échantillon
Électrons
QUESTION
Quelles sont les différences anatomiques au niveau de l'exosquellette et des organes internes abdominaux, notamment le midgut, des abeilles saines versus celles affectées par la Nosémose*?
Pour répondre à cette question, nous n'avions que huit heures de beamtime, le temps que nous pouvons utiliser un synchrotron.
*La nosémose est une maladie chez les abeilles Apis mellifera adultes. Il s'agit d'une spore, le Nosema ceranae ou le Nosema apis, qui ne peut être détecté que par l'observation au microscope. Les symptômes de cette maladie ne sont pas très spécifiques: le spore affecte le système digestif et cause la dysentrie. Ces symptômes peuvent être causés par bien d'autres maladies, donc c'est difficile de diagnostiquer les abeilles. La maladie survient surtout en printemps, mais quand elle est présente en hiver, elle est extrêmement dangereuse. Durant l'hiver, la ruche est fermée et les abeilles ne peuvent pas sortir de là, alors la propagation des spores est beaucoup plus efficace.
ÉCHANTILLONS
Avant de pouvoir commencer à utiliser le beamline, il a fallu obtenir des échantillons. Nous avons pris trois différents groupes d'abeilles pour avoir un total d'environ 100 abeilles: des abeilles saines provenant de la rûche sur le toit de notre école, des abeilles saines et malades provenant de l'Université de Laval et finalement des abeilles malades provenant d'Ontario. Nous les avons mis dans un agent de conservation appelé Pampel.
D'abord, il a fallu mettre les abeilles dans de la gélatine afin de s'assurer qu'elles ne bougent pas lors du rayonnement par le synchrotron.
BEAMTIME
Avant de pouvoir tester les échantillon, il a fallu s'assurer que toutes les composantes, c'est-à-dire la ligne de lumière, la plateforme de l'échantillon et le détecteur, du beamline soient bien alignées. Il a aussi fallu positionner l'échantillon à une certaine distance du détecteur pour pouvoir avoir une image des organes intérieurs la plus claire possible. Alors, nous avons d'abord procédé par l'alignement de la plateforme sur laquelle se repose l'échantillon. Il fallait l'aligner selon trois différents axes, qui sont les mêmes que les axes d'un avion: roll, pitch et yaw. Il est extrêmement important que la plateforme soit bien alignée selon ces trois axes, car il faut que l’échantillon soit presque parfaitement centré quand il tourne. Ceci est important, car lorsque vient le temps de reconstituer les images prises lors de la rotation, il faut qu’elles soient dans la même position pour avoir une image finale plus claire.
Après avoir fait l'alignement, il était finalement le temps de tester les échantillons d'abeilles. Nous avons pris nos meilleures abeilles déposées dans de la gélatine sur la plateforme dans la chambre, fermé l'immense porte et parti le BMIT.
RÉSULTATS
Après environ 20 minutes, nous avons finalement obtenu notre première image! Cette image s'appelle une projection, car c'est une superposition de toutes les parties de l'abeille. Les projections sont beaucoup moins longues que les CT ou computed tomography, car ceux-ci sont constitués de milliers de projections pour former un tour complet.
Il est possible de voir dans cette image... qu'il n'y a rien. Pourtant, il y avait une abeille dans le tube. Où est-elle? Notre hypothèse est que l'abeille a la même indice de refraction que la gélatine et donc les rayons ne se sont pas déviés assez pour que le détecteur puisse "voir" quelque chose.
L'équipe s'est vite regroupée pour trouver des moyens de résoudre notre problème. Nous avons donc pensé de mettre les abeilles dans le liquide original, le Pampel. Cependant, nous n'avons dû choisir que les abeilles flottantes, il fallait qu'elles soient à une certaine hauteur dans le tube.
Voici une des images obtenues pour l'abeille flottante dans le Pampel.
On a réussi à avoir une image! Cependant, on a voulu quelque chose d'encore meilleur que ceci. Alors, on a décidé de mettre l'abeille dans l'air:
Les projections ne nous aidaient pas vraiment à répondre à notre problématique, donc nous avons décidé de faire un CT d'une abeille saine et une abeille malade. Les CT nous permettent d'avoir une vue complète de l'abeille et de la couper en slices ou morceaux du bas vers le haut, de la gauche vers la droite, etc.
Nous avons obtenu beaucoup d'images des deux abeilles (saine et affectée par la nosémose), mais les plus intéressantes sont les suivantes. Les images qui suivent sont des slices des abeilles de bas en haut.
MUSCLES DES AILES DE L'ABEILLE SAINE
Thorax
Abdomen
Tête
Zoom
MUSCLES DES AILES DE L'ABEILLE MALADE
Abdomen
Thorax
Tête
Zoom
COMPARAISON DES MUSCLES DES AILES
En comparant les muscles des ailes de l'abeille saine (gauche) à ceux de l'abeille malade (droite), il est possible de voir que chaque structure est composée de trois parties: la partie supérieure et inférieure avec des fibres qui vont de bas en haut et une partie au milieu avec des fibres diagonales (obliques). Cependant, il n'y a pas de différences majeures entre les deux images.
PATTES DES ABEILLES SAINE (GAUCHE) ET MALADE (DROITE)
Dans ces images, on peut voir à quel point le BMIT est exact: on peut voir les poils sur les pattes des abeilles! C'est incroyable!
MIDGUT DE L'ABEILLE SAINE
Tête
Thorax
Abdomen
Zoom
Jabot
Midgut
Sur cette slice, on peut voir le jabot, la structure dans laquelle l'insecte transporte le nectar reccueilli des fleurs et le midgut, qui fait partie des intenstins. Il est possible de voir que le midgut possède des rétrécissements ou des constrictions qui sont très profondes et bien définies.
MIDGUT DE L'ABEILLE MALADE
Abdomen
Thorax
Tête
ANALYSE
rrrrr
Zoom
Midgut
ANALYSE
COMPARAISON DES MIDGUT
En comparant le midgut de l'abeille saine (gauche) à celui de l'abeille malade (droite), il est possible de voir que le midgut de la deuxième méllifère a des constrictions beaucoup moins définies et profondes que l'insecte à gauche. L'organe d'intérêt de l'abeille malade est plus déformé et moins rond que celui de l'abeille saine. Ces observations confirment les soupçons de la littérature scientifique.
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CONCLUSION
En conclusion, nous avons obtenu des résultats qui correspondent aux soupçons de la littérature scientifique, mais nous ne pouvons pas généraliser, puisque nous n'avons testé qu'une paire d'abeilles. Il faudra au moins trois ou quatre autres paires d'abeilles pour pouvoir créer une généralisation qui est statistiquement correcte. La prochaine étape dans cette expérience est de comparer les midgut de plusieurs autres paires de méllifères pour pouvoir en tirer des conclusions précises.
1 http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/6/60/Schéma_de_principe_du_synchrotron.jpg
2 Merci à Dean Chapman pour l'image